Questions parlementaires | Actualité - dernière mise à jour le 03 juillet 2025

2025/06/24 - Reconnaissance du métier de MJPMi - Question écrite n° 5628 de Mme Delphine Lingemann (Assemblée nationale) – Date de la question 1er avril 2025 – Date de la réponse : 24 juin 2025

Mme Delphine Lingemann attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur la situation préoccupante des mandataires judiciaires à la protection des majeurs indépendants (MJPMi).

Question

Ces professionnels assurent la gestion administrative, financière et juridique de plus de 800 000 personnes majeures protégées en France, en veillant à la préservation de leurs droits et à leur accompagnement au quotidien. Leur mission, essentielle au bon fonctionnement du système judiciaire et social, implique une charge de travail croissante et une responsabilité lourde, mais leur rémunération n'a pas évolué depuis plus de 10 ans. Depuis 2013, l'indice de référence servant à calculer leur rémunération est gelé. En 2014, l'indexation de ce forfait sur le SMIC et l'allocation aux adultes handicapés (AAH) a été supprimée au profit d'un « coût de référence » fixé à 142,95 euros brut par mois pour une personne protégée vivant en établissement avec conservation de domicile par exemple et modulé selon le lieu de vie et les ressources de la personne accompagnée. Or, depuis cette réforme, les coûts d'exercice n'ont cessé d'augmenter, notamment avec la hausse des charges sociales, avec un taux URSSAF fixé à 24,60 % depuis janvier 2025, et une augmentation des frais professionnels (assurance, déplacements, gestion administrative) ainsi que du coût de la vie, sans compensation. Malgré ces exigences croissantes, la rémunération des MJPMi reste largement insuffisante. Un mandataire indépendant perçoit en moyenne 1 800 à 2 200 euros nets par mois, bien en deçà des responsabilités qui lui incombent. De plus, les MJPMi constatent une intensification des risques psychosociaux liés à l'accompagnement de publics vulnérables, confrontés à la précarité ainsi qu'à des situations de violences verbales ou physiques. Par ailleurs, leur formation reste insuffisamment axée sur ces enjeux sociaux. Face à ces constats, elle lui demande si le Gouvernement envisage une revalorisation urgente du coût de référence, gelé depuis plus de 10 ans, afin de tenir compte de l'inflation et de l'augmentation des charges ; une indexation pérenne de ce coût sur le SMIC et l'AAH, pour éviter une nouvelle dégradation des conditions financières des MJPMi ; une réforme du cadre statutaire de la profession, garantissant une meilleure reconnaissance et une adaptation du financement aux réalités du terrain ; et enfin, une meilleure prise en compte des risques psychosociaux dans le cursus de formation. Elle souhaite connaître les mesures envisagées par le Gouvernement pour assurer la pérennité et l'attractivité de cette profession indispensable à la protection des plus vulnérables.

Réponse

La protection juridique des majeurs est une politique publique à la croisée des problématiques d'autonomie, de santé, de protection des droits fondamentaux, d'inclusion sociale des personnes âgées et handicapées et de lutte contre les maltraitances. Ce dispositif de solidarité, permet de répondre efficacement aux questions de vulnérabilité et d'isolement social, dans la mesure où le positionnement particulier des mandataires, judiciaire d'un côté, social de l'autre, leur permet d'accompagner les personnes et de garantir le respect de leurs droits, au plus près de leurs difficultés et de leurs besoins. L'encadrement du financement des mesures de protection s'explique par la diversité, tant des profils des personnes protégées que des modes d'exercice des professionnels en charge de ces mesures, puisque les Mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) peuvent en effet exercer soit à titre libéral, soit en qualité de délégués dans des services, soit comme préposés dans des établissements publics. Lorsque la mesure judiciaire de protection est exercée par un MJPM, son financement est à la charge totale ou partielle de la personne protégée, en fonction de ses ressources, avec de manière subsidiaire un financement de l'Etat. Le code de l'action sociale et des familles prévoit des modalités de financement différentes entre les services mandataires et les mandataires individuels. Les premiers sont financés sous forme de dotation globale et les seconds sur la base de tarifs mensuels, à la mesure. Ces différences se justifient par des modalités d'organisation et de fonctionnement différentes qui entraînent des charges (personnel, fonctionnement et structure) importantes pour les services. Pour autant, les tarifs des mandataires individuels ont également vocation à couvrir les frais de fonctionnement de ces intervenants. Sur le plan de la formation professionnelle, des réformes importantes ont été engagées pour favoriser la montée en compétence des mandataires judiciaires et leur garantir un niveau de qualification optimal avec, notamment, la création d'une licence professionnelle confiée aux universités en lieu et place du certificat national de compétence précédemment délivré. L'accent a également été mis sur la formation continue des mandataires qui est devenue obligatoire depuis la loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie. Le décret qui permettra de définir les contours de cette nouvelle obligation est en cours d'élaboration. Ces réformes doivent permettre de renforcer l'intervention de ces professionnels auprès des personnes concernées et contribuer ainsi à asseoir davantage leur légitimité auprès des autres acteurs, mais aussi à renforcer l'attractivité du métier de MJPM et ainsi, multiplier les professionnels sur le terrain. Par ailleurs, afin d'accompagner la hausse d'activité des MJPM, le Gouvernement a pris des dispositions pour financer des actions visant à améliorer le pilotage, l'interconnaissance et la coordination des acteurs intervenant auprès des majeurs protégés, contribuer à l'attractivité du métier de MJPM, soutenir la promotion et le soutien aux mesures alternatives aux mesures judiciaires de protection. Cette action qui est conduite depuis trois ans a permis de financer 43 projets en 2024 pour un montant total de 1 400 000 €. Concernant plus spécifiquement les mandataires individuels, compte tenu de la hausse du nombre de mesures confiées à ces professionnels (+ 6,2 % entre 2023 et 2024), les services de l'Etat agréent de plus en plus de professionnels exerçant à titre libéral et ce afin de répondre aux besoins des territoires. Ainsi, le nombre de mandataires individuels est passé de 2644 mandataires inscrits en 2019 (et 2170 financés) à 2821 inscrits (et 2465 financés) en 2024. Enfin, des mesures spécifiques ont également été prises pour faciliter les conditions de travail des mandataires individuels, notamment en assouplissant les règles relatives au recours au secrétariat spécialisé pour permettre son élargissement à la prestation de service, et en favorisant l'utilisation de locaux professionnels partagés.

Réponse au Journal Officiel du 24 juin 2025