Mise en place d'une mesure de protection

Tutelle ou Curatelle ? En France plusieurs centaines de milliers de personnes majeures bénéficient d’une mesure de protection juridique. Pourtant, si le terme de « tutelle » est assez connu, les notions de « curatelle » ou de « sauvegarde de justice » sont, elles, très peu connues du grand public.

Ce dossier présente les principes et modalités d’une demande de mise en place d’une mesure de protection ainsi que les acteurs d’une mesure de protection tels que définis par la loi du 5 mars 2007 réformant les tutelles, entrée en vigueur le 1er janvier 2009.

Sommaire

1. Introduction
2. Les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité
3. Les différentes mesures de protection
4. La demande de mise en place d’une mesure de protection
        a. Qui peut demander une mesure de protection
        b. Comment demander une mesure de protection
        c. Le contenu de la demande (requête) de protection
        d. Focus sur le certificat médical

5. Les acteurs

 

1. Introduction

    La loi détermine que tout être humain, mineur ou majeur, français ou étranger, est titulaire de droits civils attachés à sa personne et à son patrimoine.

    Mais une personne peut se trouver dans l'incapacité d’exercer ses droits, c'est-à-dire d'accomplir les actes de la vie civile, d'exercer ses droits personnels, de gérer son patrimoine.

    Les mineurs

    Les personnes mineures sont, de plein droit, protégées du fait de leur minorité. Quelqu’un doit donc les représenter légalement pour exercer en leur nom leurs droits civils, qu’il s’agisse de défendre leur personne comme leur patrimoine. En règle générale la situation est « transparente », les parents assurant directement ce rôle. Ils exercent l’autorité parentale et l’administration légale de leurs biens. Toutefois, dans certaines situations, il est nécessaire de mettre en place un régime de tutelle pour l’enfant quand les parents ne peuvent plus exercer l’autorité parentale :

    • Décès des deux parents ,
    • Impossibilité des deux parents de manifester leur volonté ,
    • Retrait de l’autorité parentale aux deux parents
    • Incapacité des parents d’assurer l’administration légale, décision du juge.

    Il est à noter que la loi autorise un parent d’un enfant mineur qui a besoin d’une protection à sa majorité à commencer des démarches pour la mise en place d’une mesure de protection dans la dernière année de la minorité de celui-ci, (Article 429 du code civil)

    Voir aussi : Tutelle d'un mineur : démarches et organisation - Démarchesadministratives.fr

    Les majeurs (et les mineurs émancipés)

    A 18 ans la personne devient majeure et peut dès lors exercer elle-même ses droits. Toutefois certains adultes sont dans l’impossibilité de pourvoir seuls à leurs intérêts en raison de l’altération de leurs facultés mentales ou physiques de nature à empêcher l’expression de leur volonté.

    L’altération des facultés mentales est, de loin, la cause majoritaire d'ouverture de mesures de protection. Quant à l'altération des facultés corporelles, elle doit, pour justifier une mesure de protection, empêcher l'expression de la volonté. 

     

    2. Les principes de nécessité, subsidiarité et proportionnalité

    Les possibilités de protection juridique d'un majeur ne doivent être utilisées qu'en dernier recours. En effet, bien qu'elles soient prononcées dans l'intérêt du majeur, elles restreignent par définition son autonomie civile. Une telle restriction doit être limitée au strict nécessaire et pour s'en assurer la loi pose dans l'article 428 du Code Civil trois principes fondamentaux : la nécessité, la subsidiarité et la proportionnalité.

    La nécessité 

    - la personne se trouve dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts. L’altération des facultés mentales ou physiques empêchent l’expression de la volonté de la personne . C’est le principe de nécessité.

    Cette ouverture de la mesure de protection doit donc répondre à une double condition donnée par l’article 425 du code civil : une altération médicalement constatée...de nature à empêcher l’expression de sa volonté.

    La subsidiarité

    - l’impossibilité de protéger les intérêts de la personne par d’autres règles comme les droits et devoirs entre époux, le mandat de protection future,...C’est le principe de subsidiarité.

    La proportionnalité

    - l’appréciation de l’état et des besoins de la personne à protéger afin de mettre en place une mesure de protection adaptée à cet état. C’est le principe de proportionnalité.

    Ainsi, une mesure de protection constitue une garantie pour ces majeurs vulnérables face aux risques d'actes préjudiciables à leurs intérêts de même qu’au risque d’une inaction tout aussi préjudiciable.
    Attention, cela ne signifie pas qu’elles ne sont plus titulaires de leurs droits civils ! Leurs droits restent intacts mais les conditions d’exercice de ces droits sont modifiées et s’opèrent en partie par l’intermédiaire d’autres personnes. C’est ce que pose l’article 415 du code civil

    Ces trois principes se retrouvent tout au long de la loi et des règles de fonctionnement des mesures. A titre d'exemples :

    1. Le principe de nécessité conduit à exiger un certificat médical pour la mise en place d'une mesure (article 430)
    2. La principe de subsidiarité se retrouve de la manière la plus explicite qui soit dans l'article 440 : "La curatelle n'est prononcée que s'il est établi que la sauvegarde de justice ne peut assurer une protection suffisante. [...] La tutelle n'est prononcée que s'il est établi que ni la sauvegarde de justice, ni la curatelle ne peuvent assurer une protection suffisante."
    3. Le principe de proportionnalité induit l'article 471 ("A tout moment, le juge peut, par dérogation à l'article 467, énumérer certains actes que la personne en curatelle a la capacité de faire seule ou, à l'inverse, ajouter d'autres actes à ceux pour lesquels l'assistance du curateur est exigée.") et l'article 473 (" [...] le juge peut, dans le jugement d'ouverture ou ultérieurement, énumérer certains actes que la personne en tutelle aura la capacité de faire seule ou avec l'assistance du tuteur.")

    Enfin, au-delà de la seule loi, chaque curateur et tuteur devra avoir à cœur d'appliquer au quotidien ces principes respectueux de la personne protégée.

    Parmi ces trois principes, le plus difficile à appliquer est le principe de proportionnalité puisqu'il pourrait conduire à avoir autant de mesures de protection différentes que de personnes protégées. Il serait alors bien difficile de s'y retrouver ! C'est pourquoi le législateur a défini trois types de mesures de protection. Elles servent de point de référence commun autour desquelles le juge peut faire varier le périmètre exact de chaque mesure. 

     

    3. Les différentes mesures de protection

    La loi définit trois régimes principaux destinés à assurer la protection des majeurs :

    La sauvegarde de justice qui est un régime provisoire

    Une telle mesure peut être instituée préalablement à l'organisation d'un régime de protection durable ou mise en œuvre pour le majeur atteint d'une altération provisoire de ses facultés personnelles.

    Voir article : la sauvegarde de justice

    La curatelle qui est un régime d’assistance

    Il permet de protéger le majeur qui a seulement besoin d'être assisté et contrôlé dans les actes les plus importants de la vie civile. Le majeur protégé reste le principal moteur des actes réalisés. Mais en imposant la double signature du majeur protégé et du curateur pour la réalisation des actes importants, ce régime permet d’éviter tout dérapage ou influence malhonnête.

    Voir article : la curatelle

    La tutelle qui est un régime de représentation

    Il permet de protéger le majeur qui doit être représenté de façon continue dans la plupart des actes de la vie civile. Il permet au tuteur de réaliser seul les actes de la vie civile pour le compte du majeur protégé. Celui-ci ne pouvant contrôler l’activité du tuteur, ce contrôle est assuré par le juge des tutelles dont l’accord préalable est nécessaire pour tous les actes importants.

    Voir article : la tutelle  

     

    4. La demande de mise en place d’une mesure de protection

    La demande de mise en place d’une mesure de protection judiciaire suppose plusieurs conditions selon les dispositions des articles 425 et 428 du code civil vus ci-dessus : une altération des facultés, médicalement constatées, de nature à empêcher l’expression de la volonté, la nécessité de cette mesure de protection ainsi que la recherche par le juge des tutelles d’un éventuel mécanisme plus souple pour le majeur à protéger.

    A. Qui peut demander une mesure de protection ?

    Seule la personne elle-même, sa famille au sens strict, mais aussi l’entourage proche, qui entretient avec la personne concernée des «liens étroits et stables » ou le procureur de la République sont habilités à demander au juge des tutelles la mise en place d’une mesure de protection. Les personnes qui peuvent saisir le juge sont précisées dans l’article 430 du code civil.

    Les autres, les tiers (services sociaux, médecins, voisins,…), peuvent adresser un signalement au procureur de la République.

    B. Comment demander  une mesure de protection ?

    Une demande de mesure de protection ne porte pas sur une mesure particulière. Il appartient au juge des tutelles de décider de la nature de cette mesure de protection.

    La forme de la requête est libre mais le contenu est encadré, strictement prévu par les textes ( articles 1217 à 1219 du code de procédure civile).

    Si une échéance importante est prévue, faites la demande de mise sous protection plusieurs mois avant. Exemples d'échéances pouvant être anticipées: cas d'un mineur ayant un handicap mental et qui sera bientôt majeur, personne âgée dépendante qui devra bientôt être placée en établissement avec nécessité de vendre son domicile, etc.

    C. Contenu de la demande (requête) de mise sous protection

    Les informations obligatoires

    La requête prévue à l'article 1218 du CPC aux fins de prononcé d'une mesure de protection d'un majeur comporte, à peine d'irrecevabilité :

    1° Le certificat médical circonstancié prévu à l'article 431 du code civil ; L’article 1219 du CPC, lui, prévoit de manière très précise les informations qui doivent figurer dans le certificat médical.

    2° L'identité de la personne à protéger et l'énoncé des faits qui appellent cette protection au regard des articles 428 et 494-1 du même code civil.

    Les informations souhaitables

    La requête mentionne également les personnes appartenant à l'entourage du majeur à protéger énumérées au premier alinéa de l'article 430 et à l'article 494-1 du code civil ainsi que le nom de son médecin traitant, si son existence est connue du requérant. Celui-ci précise, dans la mesure du possible, les éléments concernant la situation familiale, sociale, financière et patrimoniale du majeur, ainsi que tout autre élément, relatif notamment à son autonomie. (article 1218-1 du CPC)

    En outre on peut considérer que les informations nécessaires pour contrôler la qualité du requérant sont également obligatoires, à savoir l'identité du requérant (état-civil complet) et la relation entre le requérant et la personne à protéger et tout document permettant de la prouver

    Une fois les éléments de la demande de protection réunis, la requête doit être "remise ou adressée au greffe de la juridiction de première instance" (CPC Art.1217) de la résidence habituelle de la personne à protéger ..." (CPC Art.1211).

    La date de remise de la requête étant un élément susceptible de devoir être prouvée, il est conseillé de constituer cette preuve :

    - soit en adressant la requête par lettre recommandée avec accusé de réception (LR-AR)
    - soit en demandant un récépissé daté lors de la remise au greffe (mais le greffe n'est pas tenu de vous remettre un tel récépissé)

    Voir aussi : Comment se déroule la procédure de demande de protection d’un majeur - Service public.f

    D. Focus sur le certificat médical

    L'objectif principal du certificat est de permettre au juge des tutelles de décider si une mesure de protection est nécessaire et laquelle.

    - si la personne est "dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté" (CC Art.425), condition nécessaire pour qu'elle puisse bénéficier d'une mesure de protection juridique ;

    - si le besoin porte sur " la protection tant de la personne que des intérêts patrimoniaux de celle-ci ", ou s'il ne porte que sur " l'une de ces deux missions" (CC Art.425) ;

    - si la personne "sans être hors d'état d'agir elle-même, a besoin, pour l'une des causes prévues à l'article 425, d'être assistée ou contrôlée d'une manière continue dans les actes importants de la vie civile" (CC Art.440 : condition pour ouvrir une curatelle) ;

    - ou si la personne ", pour l'une des causes prévues à l'article 425, doit être représentée d'une manière continue dans les actes de la vie civile" (CC Art.440 : condition pour ouvrir une tutelle) ;

    - ainsi que toute information permettant au juge des tutelles d'étendre ou restreindre la mesure qui sera mise en place afin qu'elle soit "proportionnée et individualisée en fonction du degré d’altération des facultés personnelles de l’intéressé." (CC Art.428).

    Auditionner ou non l'intéressé

    Un second objectif du certificat est d'éviter "de procéder à l'audition de l'intéressé si celle-ci est de nature à porter atteinte à sa santé ou s'il est hors d'état d'exprimer sa volonté." (CC Art.432).

    Déterminer la durée de la mesure

    Enfin, le certificat doit également permettre de déterminer si la durée de la mesure doit être limitée à 5 ans (cas général) ou si elle peut être supérieure (cas dérogatoire lorsque "l’altération des facultés personnelles de l’intéressé décrite à l’article 425 n’apparaît manifestement pas susceptible de connaître une amélioration selon les données acquises de la science." - CC Art.441)

    Le contenu du certificat se déduit aisément des objectifs présentés ci-dessus. C'est ce que fait le code de procédure civile en son article 1219 qui indique que :

    "Le certificat médical circonstancié prévu par l'article 431 du code civil :

    1° Décrit avec précision l'altération des facultés du majeur à protéger ou protégé ;
    2° Donne au juge tout élément d'information sur l'évolution prévisible de cette altération ;
    3° Précise les conséquences de cette altération sur la nécessité d'une assistance ou d'une représentation du majeur dans les actes de la vie civile, tant patrimoniaux qu'à caractère personnel.

    Le certificat indique si l'audition du majeur est de nature à porter atteinte à sa santé ou si celui-ci est hors d'état d'exprimer sa volonté." (CPC - Art.1219)

    Il serait utile d'ajouter que, le cas échéant, le certificat précise et justifie que "l’altération des facultés personnelles de l’intéressé n’apparaît manifestement pas susceptible de connaître une amélioration selon les données acquises de la science."

    Quel médecin peut établir le certificat ?

    Pour l'ouverture d'une mesure, le certificat doit être "rédigé par un médecin choisi sur une liste établie par le procureur de la République" (CC - Art.431). Ce médecin peut solliciter l’avis du médecin traitant de la personne qu’il y a lieu de protéger. Cette liste est disponible auprès du tribunal dont dépend le majeur protégé :

    - soit auprès du procureur
    - soit auprès du service des tutelles
    - parfois sur le site internet du tribunal

    Qui doit faire établir le certificat ?

    Il appartient à l'émetteur de la demande de faire établir ce certificat.

    Quel est le niveau confidentialité ?

    "Le certificat est remis par le médecin au requérant sous pli cacheté, à l'attention exclusive du procureur de la République ou du juge des tutelles." (CPC - Art.1219)

    Quel est le coût du certificat ?

    Le coût de l'établissement de ce certificat incombe à la personne protégée.

    Le coût du certificat établi par le médecin "spécialiste" (inscrit sur la liste du procureur) est fixé par décret. Il est de 192 € TTC . Si le médecin n'a "pu établir ce certificat du fait de la carence de la personne à protéger ou protégée", alors il perçoit une indemnité de 30€ (Code de Procédure Pénale Art.R217-1). Des frais de déplacement peuvent s’ajouter.

    Voir aussi : Demande de tutelle, curatelle,etc… comment obtenir le certificat médical - Service-public.fr

     

    5. Les acteurs

    Le cœur d’un dispositif de protection est constitué du binôme formé par le majeur protégé et son curateur ou tuteur. Il est donc essentiel que se tissent des relations de confiance et de respect entre ces deux personnes.

    Le curateur ou tuteur est la personne désignée pour mettre en œuvre au quotidien la mesure de protection. Il sera choisi prioritairement parmi les membres de la famille à qui la loi du 5 mars 2007 donne un rôle prépondérant en rappelant que "la protection d'une personne vulnérable est d'abord un devoir des familles, et subsidiairement une charge confiée à la collectivité publique".

    Dans ce dernier cas, le curateur ou tuteur est désigné parmi les professionnels habilités à assurer cette fonction et dont la liste est établie par le procureur de la république. Il faut noter qu’il est possible de désigner plusieurs tuteurs, chacun étant chargé de fonctions particulières, par exemple la protection de la personne pour l’un et celle du patrimoine pour l’autre.

    - La famille et les proches, quant à eux, jouent un rôle particulier dans le cadre d’une mesure de protection. En dehors de l’éventuel tuteur nommé au sein de la famille, ils n’ont pas de rôle différent de celui qu’ils ont habituellement c’est à dire d’entourer, aider et accompagner le majeur dans la vie courante et notamment sur le plan affectif. Pourtant, bien que son rôle ne soit pas modifié, la famille est souvent perturbée par la mise en place d’une mesure de protection. L’organisation de la communication entre le tuteur et la famille ou un proche est un sujet souvent défaillant. Thème sensible, compliqué, et sujet à divergence de vues ou d’intérêts, c’est une des raisons pouvant conduire le juge des tutelles à confier la mesure à un professionnel. C’est aussi un des points les plus fréquemment reprochés aux professionnels : communiquer insuffisamment avec la famille...Cependant, la famille et les proches sont aussi des relais importants pour le mandataire judiciaire à la protection des majeurs.

    Les autres principaux acteurs d’une mesure de protection sont :

    - Le juge des tutelles, qui décide de la mise en place d’une mesure de protection et désigne la ou les personnes à qui sera confiée sa mise en œuvre.

    - Le Directeur des services de greffe judiciaires qui assure notamment le contrôle du bon déroulement de la mesure de protection par l’intermédiaire des rapports annuels de gestion que doit fournir le tuteur ou curateur.

    - Le procureur de la République, qui répertorie et contrôle les mesures de sauvegarde de justice, peut saisir le juge des tutelles lorsqu’il a connaissance d’un besoin de protection, ordonne des actes conservatoires en cas de besoin, fait annuler les actes excessifs passés par le majeur protégé, et inscrit ou radie les personnes habilitées à exercer la charge de Mandataire Judiciaire à la Protection des Majeurs.

    - Le médecin spécialiste, inscrit sur une liste établie par le procureur de la république, établit les certificats médicaux obligatoires pour les actes principaux tels que la mise en place d’une mesure de protection, ou la location ou vente du domicile du majeur protégé (qui nécessite la certitude que son état de santé ne lui permettra pas de retourner à domicile).

    - L’assistante sociale, qui a pris un rôle prépondérant de nos jours dans l’accompagnement des personnes démunies, en particulier pour tenter de les réinsérer et de mettre à leur disposition les différents systèmes existant d’aide sociale.

     

     

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    La sauvegarde de justice

    Il existe plusieurs sauvegardes de justice.

    1. La sauvegarde de justice provisoire, mesure ouverte pendant la durée d’instruction d’une requête de mise sous protection. Elle est prononcée avec ou sans mandat spécial.

    2. La sauvegarde de justice autonome, qui est une mesure de protection temporaire. Elle concerne une personne qui a besoin ponctuellement d’être représentée pour un ou plusieurs actes définis.

    3. La sauvegarde médicale, prévue par le code de la santé publique, qui consiste à faire une déclaration auprès du procureur de la République par un médecin afin de faire bénéficier à un majeur de la protection minimale du régime de sauvegarde. Elle ne vaut pas demande de mise sous un régime autre de protection.

    1. La sauvegarde de justice pendant la durée de l’instruction

    Toute requête de mise sous protection d’un majeur va déclencher une période d ‘  « instruction » de cette demande par le juge, afin que ce dernier puisse prendre une décision : ouverture ou non d’une mesure de protection.

    Pour cela, en possession de la requête accompagnée du certificat médical circonstancié, le juge va procéder à l’audition du majeur à protéger, des membres de la familles, de l’entourage. Il peut procéder à une enquête sociale, demander un avis complémentaire au médecin traitant.

    Ce délai d’instruction est de plusieurs mois. La loi fixe une limite d’un an, au terme de laquelle la requête devient caduque si le juge n’a pas pris de décision.

    Cette phase d’instruction d’une requête de mise sous protection n’entraîne aucune protection particulière de la personne concernée par la demande ce qui peut poser un problème, une difficulté pour le majeur à protéger qui ne peut attendre ce délai de plusieurs mois. Il est parfois nécessaire de prendre des décisions en urgence au vu de la situation du majeur à protéger.

    La loi a prévu un mécanisme, l’ordonnance de sauvegarde de justice, que le juge peut prendre dès réception de la requête de mise sous protection, avant même d’avoir auditionné la personne concernée, s’il l’estime nécessaire (article 433, al. 2 du code civil)

    Ce placement sous sauvegarde de justice dure le temps de l’instruction jusqu’à la prise de décision du juge des tutelles. Comme pour la requête, si le juge n’a pas pris une décision dans le délai maximal d’un an, l’ordonnance de sauvegarde de justice devient automatiquement caduque. Elle peut prendre deux formes , avec ou sans mandat spécial.

    L’ordonnance de sauvegarde de justice sans mandat n’entraîne pas de privation de droits pour le majeur protégé, elle ne modifie pas concrètement le quotidien de la personne. Le majeur protégé conserve l’exercice complet de ses droits.

    Si le placement sous sauvegarde de justice est assorti d’un mandat spécial avec la désignation d’un mandataire spécial, les droits du majeur protégé en seront affectés.

    Ordonnance de sauvegarde de justice sans désignation d’un mandataire spécial

    Le majeur protégé peut donc accomplir tous les actes pendant cette période de sauvegarde de justice (article 435 du code civil). Si le majeur avait, avant sa mise sous protection, donné une procuration bancaire à un parent, un proche , ce pouvoir continue, sauf si le juge le révoque (article 436 du code civil). Il peut continuer à se faire aider, si c’est la cas, par ce même parent ou proche dans le cadre de la gestion d’affaires (voir article), par un service médico-social, par une personne de confiance (voir article) si le majeur protégé est accueilli dans un établissement social ou médico-social.

    La décision du juge n’est susceptible d’aucun recours (art. 1249 du code de procédure civile). Elle est exécutoire dès son prononcé même si elle n’avait pas été notifiée à l’intéressé (Civ, 1re 29 juin 2011, n° 10-18.960)

    Cependant la sauvegarde de justice sans mandat spécial permet de protéger les actes du majeur si ces derniers sont contraire à ses intérêts. Il sera alors possible de les faire annuler ou d’en faire modifier les clauses dès lors qu’il est prouvé qu’ils ont lésé le majeur (article 435, al. 2 du code civil). Elle comporte également quelques exceptions à la liberté d’agir.

    Les exceptions à la liberté d’agir

    - le majeur sous sauvegarde de justice ne peut pas divorcer par consentement mutuel (art. 229-2 et art. 249-4 du code civil) mais peut recourir à un divorce accepté depuis la loi du 23 mars 2019.

    La différence réside sur la concertation sur le partage des biens, la garde des enfants, la pension alimentaire, etc. Dans le cadre du divorce pour consentement mutuel, les époux s'entendent sur toutes les modalités du divorce, ce qui n'est pas le cas du divorce accepté qui nécessite l'intervention d'un juge.

    Concernant les autres procédures de divorce, aucune demande n’est recevable avant que la personne protégée soit placée sous curatelle ou tutelle (article 249-3 du code civil)

    - le majeur sous sauvegarde de justice ne peut pas non plus faire un acte pour lequel le juge a désigné un mandataire spécial (article 435 du code civil)

    Ordonnance de sauvegarde de justice avec désignation d’un mandataire spécial

    Lorsqu’un mandataire spécial a été désigné, les droits du majeur protégés sont alors affectés. Cette désignation habilite une personne à effectuer des actes pour le compte du majeur protégé et interdit à ce dernier de les accomplir lui-même.

    L’ordonnance fixe les pouvoirs confiés au mandataire spécial, une mission générale d’administration des biens ou précise ou ponctuelle pour effectuer certains actes, même de disposition (article 437 du code civil). Ce peut-être également, sur décision spéciale du juge, une mission ayant trait à la protection de la personne dans une situation critique pour laquelle une décision en matière médicale est à prendre en urgence, par exemple (articles 457-1 à 463 du code civil).

    Les personnes pouvant être désignées comme mandataire spécial sont les mêmes que le juge peut désigner comme curateur ou tuteur.

    Cette ordonnance de sauvegarde de justice avec désignation d’un mandataire spécial n’est pas susceptible d’un recours. Seuls le choix du mandataire ou le contenu de ses mission peut faire l’objet du recours, recours possible dans les quinze jours de sa notification.

    La mission du mandataire spécial se limite à ce qui est prévu dans l’ordonnance. Elle cesse lorsque les actes prévus sont accomplis, quand la sauvegarde de justice cesse, à tout moment si le juge le décide pour mettre fin au mandat ou remplacer le mandataire spécial.

    Le mandataire spécial doit rendre compte de l’exécution de son mandat en établissant un compte de gestion, accompagné des pièces justificatives (articles 510 à 514 du code civil)

    Voir article : mise en place d’une mesure de protection

    2 . La sauvegarde de justice autonome

    Le législateur a créé en 2007 une sauvegarde de justice, temporaire, différente de la sauvegarde de justice précédente. Cette dernière permet, par une mesure de protection ponctuelle, d’éviter de mettre en place une mesure de protection à long terme. (art. 433, al. 1 du code civil)

    Elle s’adresse principalement aux familles qui, s’occupant d’un majeur vulnérable, se trouvent à un moment donné dans l’impossibilité d’accomplir un ou des actes déterminés parce qu’il s’agit d’actes de disposition, actes qui nécessitent la signature du majeur lui-même.

    Elle peut aussi s’appliquer à des situations dans lesquelles une personne peut se trouver dans une incapacité momentanée, provisoire d’exprimer sa volonté, victime d’un coma, d’un traumatisme crânien,…

    Comment faire la demande

    Comme pour toute demande d’ouverture d’une mesure de protection, la requête doit obligatoirement être accompagnée d’un certificat médical circonstancié (art. 431 du code civil). Son contenu est précisé à l’article 1219 du code de procédure civile. Son coût est fixé à 160 € par décret auquel peut s’ajouter des frais de déplacement. La demande d’ouverture peut être adressée au juge par les personnes mentionnées à l’article 430 du code civil en précisant l’identité de la personne à protéger et les faits qui la motivent et dont le contenu est fixé à l’article 1218-1 du code civil.

    Un formulaire de la requête est disponible : cerfa n° 15891, «  Requête en vue d'une protection juridique d'un majeur (habilitation familiale ou protection judiciaire) » accompagné d’une notice explicative.

    Avant 2007, la seule solution aurait été d’engager une procédure de mise sous protection judiciaire complète sur le long terme.

    Cette nouvelle procédure, plus légère pour les familles, - qui n’empêche pas le juge de mettre en place une sauvegarde de justice pendant l’instruction de la demande, ouvre par jugement et non ordonnance, une mesure de protection, avec désignation d’un mandataire spécial afin d’accomplir le ou les actes déterminés dans le jugement.

    La procédure de sauvegarde de justice autonome est la même que pour la sauvegarde de justice classique précédente : instruction du dossier de demande, auditions des parties concernées, désignation d’un mandataire et décision.

    La sauvegarde de justice autonome prend fin lorsque les actes ont été accomplis et la mesure menée à son terme. Elle prend fin également si une mesure de tutelle ou curatelle est mise en en place, la sauvegarde de justice se révélant insuffisante.

    La sauvegarde de justice prend fin, au plus tard, un an après son ouverture mais peut être prolongée de la même durée d’un an par décision du juge (article 439 du code civil) . Un certificat médical établi par un médecin figurant sur la liste dressée par le procureur devra attester de la nécessite de ce renouvellement.

    Un recours contre la décision d’ouverture peut être envisagé. Si la décision d’ouverture d’une mesure de sauvegarde de justice n’est en soi pas susceptible de recours (article 1249 du code civil), la désignation d’un mandataire avec autorisation d’effectuer certains actes est soumise à un recours.

    Inconvénients de la sauvegarde de justice autonome

    Une fois le jugement rendu, il n’est pas possible de le modifier pour y introduire d’autres actes nécessaires. Il faut refaire une procédure.

    Si les actes prévus dans le jugement n’ont pas pu être effectués dans le délai des deux ans (durée initiale plus renouvellement), une nouvelle requête sera nécessaire, mais cette fois-ci pour une mesure de protection complète.

    Raison pour laquelle, l’habilitation familiale, pour certaines situations est préférable.

    Voir article : habilitation familiale

    3. La sauvegarde médicale

    Le juge des tutelles n’intervient pas pour sa mise en place. Elle peut être déclenchée par un médecin dans les conditions prévues par l’article L. 3211-6 du code de la santé publique et article 434 du code civil. Plusieurs situations.

    Déclaration par le médecin traitant

    Le médecin traitant constate que son patient se trouve dans la situation prévue à l’article 425 du code civil, il peut faire une demande de mise sous protection au procureur de la République mais il n’en a pas l’obligation. La déclaration place d’office la personne sous sauvegarde justice. La déclaration du médecin traitant doit être accompagnée de l’avis conforme d’un psychiatre.

    Déclaration par le médecin en cas de séjour dans un établissement de santé

    Lorsque la personne est hospitalisée et dès lors que le médecin hospitalier constate que son patient se trouve dans la situation prévue à l’article 425 du code civil, il doit en faire la déclaration au procureur de la République.

    Il en va de même pour le médecin d’un établissement social ou médico-social depuis la loi n° 2015-1778 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, pour les personnes hébergées dans son établissement.

    Le procureur de la République doit en informer le préfet du département (article L.3211-6 du code de la santé publique).

    La personne protégée peut introduire un recours amiable auprès du procureur de la République pour obtenir la radiation de cette sauvegarde.

    Cette déclaration est inscrite sur un registre spécial ne peut être consulté que par les professionnels de la justice et la famille proche. Cette protection fait bénéficier le majeur protégé de la protection minimale du régime de sauvegarde, une protection contre les actes lésionnaires. Elle ne vaut pas demande de mise sous un régime autre de protection. Elle prend fin par déclaration de cessation, et en tout état de cause au bout d’un an. Elle peut être renouvelée une fois pour la même durée d’un an.

    La publicité de la sauvegarde de justice judiciaire ou médicale

    La mise en place de la sauvegarde de justice est mentionnée sur un registre spécial tenu par les services du procureur de la République. Les personnes ayant accès à ce registre sont précisées à l’article 1251-1 du code de procédure civile.

    En revanche la mesure n’est pas portée au répertoire civil, cette mesure de protection étant provisoire et laissant à la personne protégée sa capacité juridique

     

     

     

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    La curatelle

    La curatelle s’adresse aux personnes qui, sans être hors d'état d'agir elles-mêmes, selon les termes de l’ article 440 du code civil, ont besoin, pour l'une des causes prévues à l'article 425, d'être assistées ou contrôlées d'une manière continue dans les actes importants de la vie civile.

    Destinée à protéger tant les intérêts patrimoniaux que les intérêts personnels de la personne protégée, la curatelle est un régime d’assistance. La mission du curateur n’est, en effet, pas d’agir à la place et contre le gré du majeur sous curatelle mais bien de l’assister.

    Quand le jugement ne précise rien, la mesure de protection couvre en principe tant le champ des décisions patrimoniales que personnelles. Mais le juge peut exclure la protection de la personne de l’exercice de la mesure de protection. Le majeur protégé, alors, prend seul toutes les décisions personnelles qui le concernent. Le juge peut, à l’inverse, exclure la protection patrimoniale de l’exercice de la mesure de protection.

    La curatelle permet au majeur protégé de continuer à effectuer seul un certain nombre d’actes patrimoniaux de la vie courante, dits d’administration. Pour les autres actes patrimoniaux, plus importants, dits de disposition, qui peuvent engager son patrimoine de manière substantielle, aucun acte ne peut se faire sans l’accord du majeur protégé, mais toujours avec l’assistance du curateur.

    Sommaire :

    1 – Un régime d’assistance
    A - La curatelle simple
    B - La curatelle renforcée
    C - La curatelle aménagée

    2 – Protection du patrimoine
    A – Les actes d’administration et de disposition
    B – Renforcement de l’autonomie patrimoniale en curatelle
    C – Protections spécifiques

    3 – Protection de la personne
    A - Les actes personnels
    B – Les actes personnels renforcés
    C – Les actes strictement personnels
    D – Les actes spécialement protégés
    E – Les actes médicaux

    4 – Mise en place d’une curatelle
    A - Ouverture d’une mesure de curatelle
    B - Désignation du curateur
    C – Fin de la curatelle

    1 - Un régime d’assistance

    Le régime de la curatelle comprend des degrés différents selon ce qu’aura décidé le juge des tutelles, en fonction des besoins du majeur protégé. C’est le principe de la proportionnalité qui s’applique ici comme pour toutes les mesures de protection. L’assistance du curateur qui est apportée sera différente dans le cas de la curatelle dite « simple », de la curatelle renforcée ou de la curatelle aménagée.

    A - La curatelle simple

    Mesure essentiellement préventive, la curatelle simple permet au majeur de gérer entièrement son quotidien. Il peut accomplir tous les actes dits d’administration.

    Les actes d’administration sont définis comme les « actes d’exploitation ou de mise en valeur du patrimoine de la personne protégée dénués de risque anormal ». Font partie des actes d’administration, la gestion des revenus courants, le paiement des loyers et des factures concernant les petits achats, les travaux d’entretien,…

    La personne protégée continue de percevoir directement ses ressources sur son compte et de payer ses dépenses.

    Le curateur va intervenir ponctuellement dans une curatelle simple, pour autoriser ou refuser d’autoriser un acte de disposition, acte qui nécessite une double signature, celle du majeur et du curateur.

    Les actes de disposition sont définis comme des actes « qui engagent le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l’avenir, par une modification importante de son contenu, une dépréciation significatives de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ». Font partie des actes de disposition : la vente d’un bien immobilier, les placements, les donations, le prélèvement de sommes importants ou les achats d’une certaine valeur,...

    B - La curatelle renforcée

    Ce régime et adapté aux personnes qui sont aptes à comprendre, à gérer et s’occuper de leur quotidien mais ne peuvent assurer, planifier la gestion de leur budget global.

    La différence avec la curatelle simple est que le curateur intervient dans la gestion courante du budget. Il perçoit, seul, les revenus de la personne et règle les dépenses auprès des tiers.

    Dans ce cas de figure, le curateur établit le budget avec le majeur protégé, règle les dépenses contraintes, assure une gestion équilibrée des revenus. Il reverse l’excédent des revenus au majeur (article 472 du code civil) sur un compte à sa disposition.

    Le curateur n’a pas, en effet, à se substituer à la personne protégée pour décider de l’utilisation des sommes restantes, après paiement des dépenses incontournables, récurrentes, contraintes comme le loyer et les dettes. Il n’a pas à décider de ce qui est « raisonnable » pour le majeur.

    Mais il appartient au curateur, s’il estime que la personne protégée fait une utilisation inappropriée de son argent pouvant le mettre en danger, d’informer le juge qui pourra prendre des mesures plus adaptées ou renforcées.

    C - La curatelle aménagée

    La curatelle aménagée (article 471 du code civil) permet au juge des tutelles d’adapter les modalités de la curatelle, en précisant dans le jugement, les actes que le majeur peut faire et ceux pour lesquels l’assistance du curateur sera nécessaire. Cela concerne, par exemple, parfois la conservation par la personne sous curatelle d’un chéquier. Dans le cadre d’une curatelle renforcée aménagée, le juge peut préciser les charges que la personne protégée pourra assumer seule. C’est du « sur mesure ».

    2 - Protection du patrimoine

    A - Les actes d’administration et de disposition

    La curatelle, régime d’assistance, confère des pouvoirs d’une part à la personne protégée, d’autre part à son curateur. Ces pouvoirs varient en fonction de l’acte patrimonial envisagé. La distinction se fait entre les actes d’administration et les actes de disposition.

    Ces notions d’actes d’administration et de disposition, en matière de tutelle ou de curatelle, ont une grande importance. En curatelle, elles permettent de délimiter les pouvoirs du majeur protégé et de la personne chargée de sa protection.

    Les actes de disposition

    Dans le régime de la curatelle, les actes de disposition sont des actes qui nécessitent la double signature, celle du majeur et du curateur en application de l’article 467, alinéa 1 du code civil

    Les actes de disposition ne nécessitent donc pas que le curateur ou le majeur protégé sollicitent l’autorisation du juge des tutelles. L’assistance du curateur suffit, par l’apposition de sa signature. Si le curateur refuse son assistance pour un acte de disposition, le majeur protégé peut saisir le juge des tutelles afin d’obtenir une autorisation d’accomplir seul cet acte de disposition. (article 469, al. 3 du code civil).

    Les actes d’administration

    Le majeur protégé, en curatelle, peut accomplir seul les actes conservatoires et d’administration relatifs à son patrimoine, (sauf éventuelles restrictions définies dans le jugement) (article 467 du code civil).

    Le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 a fixé la liste des actes d’administration et de disposition. Deux tableaux : le premier dresse la liste des actes qui sont impérativement soit d’administration, soit de disposition ; le second dresse la liste des actes qui appartiennent à l’une ou l’autre de ces catégories en fonction de circonstances particulières.

    Une circulaire d’application du 9 février 2009 donne un exemple de cette modulation en fonction des circonstances. (Point 6.2. La liste des actes d’administration et de disposition)

    Le juge peut à l’ouverture du jugement ou plus tard, à partir de ces règles de principes, énumérer des actes de disposition que le majeur protégé pourra faire seul ou des actes d’administration qu’il ne pourra pas effectuer sans l’assistance de son curateur (article 471 du code civil). Cette possibilité permet au juge des tutelles de prendre en compte au mieux l’état de santé du majeur protégé et/ou de gérer certaines particularités de la gestion patrimoniale.

    Le majeur sous curatelle peut saisir le juge en raison du refus du curateur de réaliser un acte et donc d’apposer sa signature à côté de la sienne (article 469, al.3 du code civil). C’est le juge qui, alors, prendra la décision d’autoriser ou non le majeur à passer seul l’acte en rendant une ordonnance, susceptible de recours.

    Le curateur peut également saisir le juge des tutelles, s’il estime que le majeur, en refusant d’accomplir un acte, compromet gravement ses intérêts (article 469, al. 2 du code civil) pour être autorisé à accomplir seul un acte déterminé ou provoquer l'ouverture de la tutelle.

    B - Renforcement de l’autonomie patrimoniale en curatelle

    La loi du 23 mars 2019 a renforcé l’autonomie de la personne protégée s’agissant de certains actes patrimoniaux. La personne en curatelle peut sans assistance :

    • signer un partage amiable, sans que la soumission de l’état liquidatif à l’approbation du juge ne soit requise ;
    • accepter purement et simplement une succession bénéficiaire, une fois obtenu au préalable, une attestation notariale témoignant que l’actif dépasse manifestement le passif.
    • conclure un contrat d’obsèques
    • ouvrir un compte dans sa banque habituelle
    • placer de l’argent « sur un compte »
    • signer des conventions de gestion de valeurs mobilières et des instruments financiers

    Ces dispositions limitent la protection des biens du majeur protégé par le curateur, tout particulièrement en curatelle renforcée. Certaines opérations comme le placement des sommes perçues d’une succession bénéficiaire sur un compte titre ouvert par le majeur protégé dans sa banque habituelle pourront se faire sans que le curateur ou le juge soient informés. Il sera toujours possible de réduire ou de rescinder les actes en question avec l’article 465 du code civil.

    C - Protections spécifiques

    Certains actes patrimoniaux sont spécifiquement protégés lorsqu’une personne est sous tutelle ou curatelle. Il en est ainsi du logement et des comptes bancaires.

    Le logement

    Le logement du majeur protégé bénéficie d’une protection renforcée qui supporte des conditions strictes définies par la loi et sous le contrôle du juge des tutelles (article 426 du code civil).

    La loi impose que le logement de la personne protégée, sa résidence principale ou secondaire soient conservées à sa disposition aussi longtemps que possible

    S’il est nécessaire de vendre son logement (ou ses meubles), de le louer ou de résilier le bail, le curateur doit demander l’autorisation du juge (voir modèle de requête de vente d’un bien immobilier ; modèle de requête de résiliation du bail du logement). En curatelle, le majeur doit donner son accord à l’opération.

    Une exception au principe d’assistance, concernant le logement existe. Si le majeur sous curatelle s’oppose à toutes les tentatives du curateur pour lui trouver un logement, le juge peut autoriser le curateur à signer seul un bail d’habitation ou une convention d’hébergement (article 472 du code civil)

    Si le majeur sous curatelle doit intégrer un établissement spécialisé, l’avis médical de tout médecin suffit hors celui de l’établissement. Cet avis doit mentionner les pathologies constatées et leur probable évolution ainsi que leurs conséquences sur la possibilité d’un retour à son domicile de la personne protégée (article 426 du code civil). Le coût de ce certificat est de 25 €, majoré éventuellement du coût du déplacement.

    Les souvenirs, les objets personnels, ceux qui sont indispensables, si la personne est handicapée, ou ceux destinés aux soins du majeur doivent être gardés à sa disposition, le cas échéant, par l’établissement spécialisé qui reçoit le majeur protégé.

    Les comptes bancaires

    Une protection spécifique des comptes bancaires a été mise en place par la loi du 5 mars 2007, modifiée par la loi du 23 mars 2019

    La personne protégée bénéficie d’un droit au compte bancaire. Si elle n’est titulaire d’aucun compte ou livret, le curateur doit lui en ouvrir un. Les opérations bancaires effectuées au nom et pour le compte de la personne protégée doivent être réalisées au seul moyen des comptes ouverts à son nom. Les produits et plus-values générées par les fonds appartenant au majeur protégé lui reviennent exclusivement (article 427 du code civil)

    Depuis la loi du 23 mars 2019, certaines autorisations judiciaires concernant les comptes bancaires ont été supprimées.

    • L’ouverture et la modification des comptes bancaires au nom de la personne protégée dans sa banque habituelle et les clôtures de comptes ouverts pendant la mesure de protection peuvent se faire librement par le curateur

    Mais l’autorisation du juge des tutelles reste nécessaire pour :

    • L’ouverture d’un compte ou livret dans un autre établissement bancaire que celui dans lequel la personne protégée détient déjà des comptes ou livrets.
    • La clôture d’un compte ou livret appartenant à la personne protégée ayant été ouvert avant le jugement d’ouverture de la mesure de protection. (voir modèle de requête

    Interdiction bancaire

    Si le majeur protégé fait l’objet d’une interdiction bancaire, le curateur peut, avec l’autorisation du juge, faire fonctionner sous sa signature les comptes dont il est titulaire et disposer de tous les moyens de paiement habituels.

    3 - Protection de la personne

    A - Les actes personnels

    La loi de 2007 a légiféré sur les conditions dans lesquelles les décisions personnelles de la personne protégée pouvaient être prises. Cette notion de protection de la personne consiste à prendre en compte le plus possible la volonté de la personne protégée dans l’organisation de sa vie personnelle.

    Dans le jugement d’ouverture, soit ultérieurement, le juge des tutelles va fixer les caractéristiques de l’intervention de la personne en charge de la mesure de protection.

    Le juge des tutelles peut aussi, exclure la protection de la personne de l’exercice de la mesure de protection ou à l’inverse ne prévoir qu’une mesure de protection limitée à la personne.

    Cette intervention de la personne en charge de la mesure de protection doit, quand cela est possible, se limiter à donner au majeur protégé une information adaptée à son état, afin que ce dernier puisse prendre seul la décision dans la mesure où son état le permet » (article 457-1 du code civil)

    « La personne protégée reçoit de la personne chargée de sa protection, selon des modalités adaptées à son état et sans préjudice des informations que les tiers sont tenus de lui dispenser en vertu de la loi, toutes informations sur sa situation personnelle, les actes concernés, leur utilité, leur degré d'urgence, leurs effets et les conséquences d'un refus de sa part »

    Ainsi le majeur sous curatelle prend seul les décisions relatives à sa personne dans la mesure où son état le permet, concernant le choix du lieu de résidence, du lieu de vacances, les loisirs, l’organisation de ses fréquentations, la pratique d’une religion,….

    Si l’état de la personne protégé ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le juge peut donner mission à la personne en charge de la protection de l’assister dans la prise de décision (article 459 du code civil).

    Le juge peut prévoir cette assistance pour tous les actes personnels ou seulement pour certains. Comme en matière patrimoniale, l’assistance s’exerce par un double consentement à l’acte

    La loi a prévu, également, une disposition qui résulte de l’ article 459, al 4 du code civil, qui prévoit que la personne en charge de la mesure de protection peut prendre à l’égard du majeur protégé des mesures de protection nécessaires pour mettre fin au danger que, du fait de son comportement, l’intéressé ferait courir à lui-même.

    Cette notion de danger couvre essentiellement une notion de danger physique. Dans ce cas le curateur doit en informer sans délai le juge des tutelles

    B- Actes personnels renforcés : mariage, divorce et PACS

    Le législateur, avec la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 a également apporté des modifications du droit des majeurs protégés en supprimant un certain nombre d’autorisations judiciaires afin de renforcer « l’autonomie de la volonté des majeurs protégés pour les actes personnels que sont le mariage, le partenariat civil de solidarité et le divorce ». A l’autorisation préalable du juge sera substitué un droit d’opposition élargi de la personne chargée de la mesure de protection si elle estime que l’acte est contraire aux intérêts du majeur. (Annexe 8 de la circulaire d’application de la loi du 25 mars 2019).

    De tels actes ne sont pas, en effet, seulement des actes personnels, ils ont aussi une dimension patrimoniale, Appelés actes mixtes, ces actes ont une double nature, patrimoniale et extra patrimoniale. Ce sont des actes qui peuvent avoir des conséquences pécuniaires pour le majeur protégé. Les nouvelles règles :

    Mariage

    Depuis la loi du 23 mars 2019, le majeur sous curatelle n’a plus à obtenir l’accord du curateur pour se marier. Il devra simplement informer préalablement le curateur du projet de mariage (article 460 du code civil). Les futurs époux devront justifier de cette information auprès de l’officier d’état civil sans quoi la célébration du mariage ne pourra pas avoir lieu. (article 63 du code civil). Tout mode de preuve est admis mais par écrit (Note Chancellerie C1/DP/812-2017/2.1.2/CD/MLV, 29 mars 2019).

    Le curateur peut exercer un droit d’opposition au mariage, s’il considère que ce dernier est contraire aux intérêts de la personne protégée (article 175 du code civil), dans les conditions prévues à l’article 173 du code civil. Il ne peut invoquer que les causes de nullité du mariage prévues, notamment le défaut de consentement de l’article 146 du code civil.

    En présence d’un patrimoine important, il peut être prudent de faire précéder l’union d’un contrat de mariage destiné à protéger les intérêts du majeur protégé. La loi prévoit (article 1399, al 1er du code civil) que le majeur doit être assisté, s’il entend passer une convention matrimoniale.

    Par dérogation à la règle d’assistance, le curateur peut saisir le juge des tutelles pour être autorisé à conclure seul une convention matrimoniale (alinéa 3 de l’article 1399 du code civil) en vue de protéger les intérêts de la personne protégée.

    Il est à craindre que le futur époux du majeur protégé refuse de signer cette convention matrimoniale qu’il pourra considérer comme une intrusion dans son patrimoine. Cette autorisation du juge ne permettra de passer outre le veto du conjoint et ne pourra donc pas empêcher les époux de se marier.

    Le curateur ne peut former opposition au mariage pour la sauvegarde des intérêts patrimoniaux du majeur protégé  si ce dernier ne souhaite pas établir un contrat de mariage. Le tribunal de grande instance de Caen a condamné un curateur à verser à un couple une somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens (TGI Caen, 2ème chambre civ., 19 sept. 2019, n° 19/02537)

    Le curateur n’est pas non plus à l’abri d’une condamnation à des dommages-intérêts en cas d’opposition abusive (article 179 du code civil), ne bénéficiant pas de l’immunité dont jouissent les ascendants.

    Pacs

    Aucune autorisation ou assistance n’est requise lors de la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil ou devant le notaire pour le curatélaire (article 461, al.1 du code civil).

    Pour la conclusion d’un Pacs, la personne sous curatelle, comme en tutelle, doit être assistée lors de la signature de la convention par laquelle elle conclut le pacte.

    Concernant la dissolution du Pacs, le majeur peut le rompre librement par déclaration conjointe ou par décision unilatérale. En curatelle le majeur est assisté pour la signification et les opérations de liquidation (article 461, al. 3 et 4 du code civil)

    Divorce

    Pendant une demande d’ouverture d’une mesure de protection

    L’article 249-3 du code civil interdit d’examiner la demande en divorce à toutes les hypothèses dans lesquelles un époux fait l’objet d’une procédure de mise sous protection juridique. La demande en divorce ne peut être examinée qu’après la mise en place de la mesure. En attendant, le juge aux affaires familiales peut prendre, en cas de besoin, des mesures provisoires prévues aux articles 254 et 255 du code civil

    Après l’ouverture d’une mesure de protection

    Une fois la mesure de protection ordonnée, la procédure de divorce peut avoir lieu.

    La nouveauté de la loi du 23 mars 2019 consiste en la possibilité pour le majeur protégé de pouvoir divorcer pour acceptation du principe de la rupture du mariage. L’article 249 du code civil précise que « la personne protégée peut accepter seule le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci ». Il peut seul, recourir au divorce accepté et ne pourra pas être assisté de son curateur.

    Si le majeur peut accepter seul le principe du divorce, dans la procédure en divorce, le majeur en curatelle exercera l'action lui-même (en demande comme en défense), avec l'assistance de son curateur.

    Pour les majeurs protégés, le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage s’ajoute aux autres possibilités suivantes : le divorce pour altération du lien conjugal (délai de un an) et le divorce pour faute. Reste interdit le divorce par consentement mutuel qu’il soit judiciaire (article 249-4 du code civil) ou par acte sous signature privée contresigné par avocats (article 229-2 du code civil) car il ne permet pas un contrôle judiciaire sur la liquidation des droits patrimoniaux. Dans le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage, il appartient au juge de statuer sur les conséquences du divorce.

    En cas d’opposition d’intérêt, si, par exemple, la mesure de protection a été confiée au conjoint, un curateur ad hoc est nommé (article 249-2 du code civil)

    Pour en savoir plus :

    C - Les actes strictement personnels

    Le majeur peut également accomplir, seul, certains actes dits « strictement personnels » que la loi énumère à l’article 458 du code civil . Cette liste est non limitative : déclaration de naissance d’un enfant, reconnaissance d’un enfant, actes de l’autorité parentale relatifs à un enfant, la déclaration du choix ou du changement du nom d’un enfant et le consentement donné à sa propre adoption ou celle d’un enfant.

    Ce sont des actes pour lesquels personne ne peut consentir hors la personne concernée elle-même. Ces actes sortent du champ de compétence du juge des tutelles ou de la personne chargée de la mesure de protection. Il en résulte que si le majeur protégé n’est pas en mesure de prendre la décision, l’acte ne pourra pas se faire.

    D - Les actes spécialement protégés

    Ces actes concernent le choix du logement et les relations personnelles qu’entretient le majeur protégé avec les tiers, le droit d’être hébergé par eux et d’être visité par eux. La personne en charge de la protection n’a pas de pouvoir décisionnel en la matière et ne peut rien imposer.

    Si une difficulté apparaît, le juge des tutelles devra être saisi, saisine simple par courrier, en expliquant la difficulté. Le juge, rendra une décision qui peut faire l’objet d’un recours. (article 459-2 du code civil)

    E - Les actes médicaux

    Si le code civil a édicté les principes généraux sur la protection de la personne, les textes particuliers concernant les actes médicaux figurent pour l’essentiel dans le code de la santé publique. Une ordonnance du 11 mars 2020 a modifie ces dispositions du code de la santé publique et du code de l'action sociale et des familles qui traitent des décisions prises à l'égard des majeurs protégés. Elle met à jour ces dispositions avec le régime de protection instauré par la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs.

    Les actes médicaux sont soumis, au titre des dispositions générales, au régime de l’obligation d’information et au recueil du consentement qui figurent aux articles L.1111-2, al. 1er et L.1111-4 du code de la santé publique.

    Le premier de ces textes énonce que toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. L’information porte sur l’action proposée, son utilité, son urgence éventuelle, ses conséquences .
    L’information doit être appropriée et le consentement doit être libre et éclairé.

    L’information doit être délivrée au cours d’un entretien individuel avec l’intéressé, conformément à l’article L.1111-2 du code de la santé publique. La personne peut être accompagnée d’un tiers qui peut-être la personne de confiance.

    De son côté, l’article 459 du code civil pose comme règle fondamentale que le majeur protégé prend seul les décisions qui relèvent de la sphère personnelle dans la mesure où son état le permet. Le majeur consent donc seul aux soins s’il est en état de le faire que l’acte soit bénin ou grave. En curatelle, le majeur protégé n’a pas besoin d’être assisté en matière de décision médicale, dès lors qu’il est apte à prendre une décision éclairée.

    Rôle du curateur avec mission d’assistance à la personne protégée

    Lorsque l'état de la personne protégée ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué peut prévoir qu'elle bénéficiera, pour l'ensemble des actes relatifs à sa personne ou ceux d'entre eux qu'il énumère, de l'assistance de la personne chargée de sa protection (article 459, al.2 du code civil) hors les cas prévus à l’article 458 du code civil

    Dans ce cas de figure, l’information peut être délivrée à la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec assistance à la personne si le majeur protégé y consent expressément.

    Dans le cadre de ce pouvoir d’assistance donné au curateur, ce dernier doit veiller à ce qu’une information médicale a été donnée au majeur protégé dans les conditions de l’article 457-1 du code civil et l’assister.

    En cas de désaccord, le juge des tutelles peut autoriser l’un ou l’autre à prendre la décision.

    En cas d’urgence médicale, le médecin pourra passer outre le refus et délivrer les soins nécessaires (article L111-4 du code de la santé publique)

    Si le pouvoir d’assistance s’avère insuffisant, le curateur doit saisir le juge des tutelles d’une requête aux fins de représentation.

    En curatelle, le majeur protégé peut rédiger des directives anticipées et désigner une personne de confiance sans l’assistance de son curateur. Les directives anticipées ne peuvent être utilisées que dans le cadre de la fin de vie.

    4 - Mise en place d’une curatelle

    A - Ouverture d’une mesure de curatelle

    Comme pour toute demande d’ouverture d’une mesure de protection, la requête doit obligatoirement être accompagnée d’un certificat médical circonstancié (art. 431 du code civil). Son contenu est précisé à l’article 1219 du code de procédure civile. Son coût est fixé à 160 € par décret auquel peut s’ajouter des frais de déplacement. La demande d’ouverture peut être adressée au juge par les personnes mentionnées à l’article 430 du code civil en précisant l’identité de la personne à protéger et les faits qui la motivent et dont le contenu est fixé à l’article 1218-1 du code civil.

    Un formulaire de la requête est disponible : cerfa n° 15891, intitulé «  Requête en vue d'une protection juridique d'un majeur (habilitation familiale ou protection judiciaire) » accompagné d’une notice explicative.

    La procédure est là aussi identique aux autres mesures : instruction du dossier de demande par le juge des tutelles, auditions des parties concernées, décision.

    Voir article : Mise en place d’une mesure de protection

    B – Désignation du curateur

    Sous curatelle, le majeur est assisté par un curateur désigné par le juge qui l’aide à accomplir les actes mettant en jeu son patrimoine. Le juge doit respecter une hiérarchie entre les personnes susceptibles d’être nommées comme indiqué aux articles 448 et 449 du code civil.

    Cela va de la personne désignée par le majeur à protéger, au cercle familial et d’amis. Si aucun membre de la famille, ni aucun proche ou allié ne peut ou ne souhaite prendre la charge de curateur, le juge va désigner un mandataire professionnel.

    Le juge peut désigner une pluralité de curateurs, en considération de la situation du protégé, de la consistance du patrimoine à gérer et des aptitudes des curateurs.

    Il peut désigner également un curateur chargé de la personne et un autre chargé du patrimoine et/ou un « subrogé curateur » qui va contrôler les actes du curateur et alerter le juge en cas d’irrégularité (article 454 du code civil).

    En l’absence de subrogé curateur, le juge pourra nommer également un « curateur ad hoc » lorsque les intérêts du curateur se trouvent en opposition avec ceux de la personne protégée (en matière de divorce lorsque l’époux est curateur, par exemple).

    La rémunération du curateur

    Curateur familial

    Un proche qui devient curateur exerce sa mission gratuitement. Le juge peut autoriser le versement d’une indemnité au curateur bénévole, dont il fixe le montant, si l’importance des biens à gérer ou sa difficulté le justifient (article 419 du code civil)

    Curateur professionnel

    Une curatelle exercée par un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJMP), un professionnel, fait l’objet d’une rémunération, fixée par les pouvoirs publics, à la charge de la personne protégée, en fonction de ses ressources (article R.471-5-3 du code de l’action sociale et des familles). La collectivité publique prend en charge le financement, si la personne protégée ne peut, intégralement ou partiellement la financer.

    Le juge des tutelles, peut également, allouer au mandataire, une rémunération complémentaire, fixée par les pouvoirs publics, pour l’accomplissement de démarches particulièrement longues ou complexes sortant de la gestion normale de la mesure de protection (article D. 471-6 du code de l’action sociale et des familles).

    C - Fin de la curatelle

    La curatelle peut cesser dans quatre cas  (article 443 du code civil):

    • Avec un jugement de mainlevée.La décision peut intervenir au moment de la révision de la mesure mais également à tout moment
    • La curatelle arrive à son terme. Sans demande de renouvellement de la mesure ou si aucune autre mesure n’est prononcée, l’arrivée du terme de la curatelle est une cause d’extinction. Le majeur protégé retrouve sa pleine capacité juridique.
    • En cas d’éloignement géographique (article 443, al 2 du code civil). Si la personne réside hors du territoire national et que cet éloignement empêche le suivi et le contrôle de la curatelle
    • Le décès du majeur protégé. Au décès du majeur protégé, si le curateur organise les obsèques et clôture les comptes bancaires à la place des héritiers, l’ex-curateur est considéré comme faisant de la gestion d’affaires.

     

     

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    La tutelle

    La tutelle s’adresse aux personnes qui selon les termes de l’article 440 du code civil ont besoin, pour l’une des causes prévues à l’article 425, d’être représentées de manière continue dans les actes de la vie civile.

    Sommaire :

    1 – Un régime de représentation

    2 – Protection du patrimoine
    A – Les actes d’administration et de disposition
    B – Renforcement de l’autonomie patrimoniale du tuteur
    C – Protections spécifiques

    3 – Protection de la personne
    A - Les actes personnels
    B – Les actes personnels renforcés : mariage, divorce et PACS
    C – Les actes strictement personnels
    D – Les actes spécialement protégés
    E – Les actes médicaux

    4 – Mise en place d’une tutelle
    A - Ouverture d’une mesure de tutelle
    B - Désignation du tuteur
    C – Fin de la tutelle

    1 – Un régime de représentation

    Destinée à protéger tant les intérêts patrimoniaux que les intérêts personnels de la personne protégée, la tutelle est un régime de représentation. Le tuteur va représenter le majeur dans tous les actes de la vie civile. Comme pour la curatelle, la loi offre la possibilité d’aménager la tutelle afin de tenir compte des souhaits du majeur et de sa capacité à effectuer certains actes seul ou avec l’assistance du tuteur. (article 473, al 2 du code civil). Cela permet d’individualiser la mesure de protection en fonction de la lucidité de la personne protégée

    La tutelle permet au tuteur d’accomplir seul les actes courants d’administration du patrimoine de la personne protégée. Pour les autres actes, dits de disposition, le tuteur pourra les accomplir, avec l’autorisation préalable du juge des tutelles (ou du conseil de famille le cas échéant).

    2– Protection du patrimoine

    Ces notions d’actes d’administration et de disposition ont une grande importance. Elles permettent, en effet, de délimiter les pouvoirs de chacun, ceux du majeur protégé et ceux de l’organe de protection, le tuteur.

    A – Les actes d’administration et de disposition

    Le tuteur peut accomplir seul les actes actes d’administration, actes courants de gestion (article 504 du code civil) à l’exception de certains actes que la personne en tutelle aura la capacité de faire seule ou avec l'assistance du tuteur, actes éventuellement énumérés dans le jugement d'ouverture ou ultérieurement.

    Ces actes d’administration sont définis comme les « actes d’exploitation ou de mise en valeur du patrimoine de la personne protégée dénués de risque « anormal ». Font partie de ces actes d’administration, la gestion des revenus courants, le paiement des loyers et des factures concernant les petits achats, les travaux d’entretien…

    Pour les autres actes dits de disposition, le tuteur les accomplit aussi, mais avec l’autorisation préalable du juge des tutelles ou du conseil de famille le cas échéant.

    Les actes de disposition sont définis comme des actes « qui engagent le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l’avenir, par une modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ». Font partie des actes de disposition : la vente d’un immeuble, les placements, les donations, le prélèvement de sommes importantes ou les achats d’une certaine valeur…

    Le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 a fixé la liste des actes d’administration et de disposition. Deux tableaux : le premier dresse la liste des actes qui sont impérativement soit d’administration, soit de disposition ; le second dresse la liste des actes qui appartiennent à l’une ou l’autre de ces catégories en fonction de circonstances particulières.

    Une circulaire d’application du 9 février 2009 donne un exemple de cette modulation en fonction des circonstances. (Point 6.2. La liste des actes d’administration et de disposition)

    Actes interdits au tuteur, même avec autorisation

    Le tuteur a l’interdiction d’accomplir certains actes même avec l’autorisation du juge des tutelles (article 509 du code civil)

    • Aliéner à titre gratuit des biens ou des droits de la personne protégée (hors donation) : remise de dette, renonciation gratuite à un droit acquis, renonciation anticipée à l'action en réduction visée aux articles 929 à 930-5, mainlevée d'hypothèque ou de sûreté sans paiement ou constitution gratuite d'une servitude ou d'une sûreté pour garantir la dette d'un tiers ;
    • Acquérir d'un tiers un droit ou une créance que ce dernier détient contre la personne protégée (rachat de créance) ;
    • Exercer le commerce ou une profession libérale au nom de la personne protégée ;
    • Acheter les biens de la personne protégée ainsi que les prendre à bail ou à ferme, sous réserve des dispositions de l'article 508. Ces dispositions de l’article 508 concernent le tuteur familial, qui à titre exceptionnel et dans l'intérêt de la personne protégée, peut, sur autorisation du conseil de famille ou, à défaut, du juge, acheter les biens de celle-ci ou les prendre à bail ou à ferme. Pour la conclusion de l'acte, le tuteur est réputé être en opposition d'intérêts avec la personne protégée. Ces dispositions ne concernent pas les tuteurs professionnels.
    • Transférer dans un patrimoine fiduciaire les biens ou droits d'un majeur protégé. C’est un contrat qui permet de faire gérer les biens de la personne protégée par un tiers de confiance

    B – Renforcement de l’autonomie patrimoniale du tuteur

    La loi du 23 mars 2019 a supprimé l’autorisation préalable du juge des tutelles pour certaines décisions patrimoniales. Le tuteur peut agir seul, sans l’aval du juge des tutelles ou du conseil de famille pour :

    • Procéder au partage amiable d’une succession ou d’une indivision. Cependant la déjudiciarisation est très encadrée comme en cas de conflits d’intérêts (article 507 du code civil). D’autre part l’état liquidatif, préalable nécessaire à tout partage, demeure subordonné à l’approbation du juge.
    • Accepter une succession purement et simplement si l’actif dépasse manifestement le passif après recueil d’une attestation du notaire chargé du règlement de la succession (article 507-1 du code civil). C’est le notaire qui se trouve substitué au juge. Si ce dernier n’est pas en mesure de la fournir, l’autorisation préalable du juge restera nécessaire.
    • Conclure un contrat avec un tiers pour la gestion de valeurs mobilières et instruments financiers de la personne protégée. Il doit choisir ce tiers en considération de son expérience professionnelle et de sa solvabilité (article 500 du code civil)
    • Souscrire une convention obsèques pour le majeur protégé (article L.132-4-1 du code des assurances). Ces formules de financement d'obsèques prévoient expressément l'affectation à la réalisation des obsèques du souscripteur ou de l'adhérent, à concurrence de leur coût, du capital versé au bénéficiaire.

    C - Protections spécifiques

    Certains actes patrimoniaux sont spécifiquement protégés lorsqu’une personne est sous tutelle ou curatelle. Il en est ainsi du logement et des comptes bancaires.

    Le logement

    Le logement du majeur protégé bénéficie d’une protection renforcée qui supporte des conditions strictes définies par la loi et sous le contrôle du juge des tutelles (article 426 du code civil).

    La loi impose que le logement de la personne protégée, sa résidence principale ou secondaire soient conservées à sa disposition aussi longtemps que possible

    S’il est nécessaire de vendre son logement (ou ses meubles), de le louer ou de résilier le bail, le tuteur doit demander l’autorisation du juge (voir modèle de requête de vente d’un bien immobilier; modèle de requête de résiliation du bail du logement).

    Si le majeur sous tutelle doit intégrer un établissement spécialisé, l’avis médical de tout médecin suffit hors celui de l’établissement. Cet avis doit mentionner les pathologies constatées et leur probable évolution ainsi que leurs conséquences sur la possibilité d’un retour à son domicile de la personne protégée (article 426 du code civil). Le coût de ce certificat est de 25 €, majoré éventuellement du coût du déplacement.

    Les souvenirs, les objets personnels, ceux qui sont indispensables, si la personne est handicapée, ou ceux destinés aux soins du majeur doivent être gardés à sa disposition, le cas échéant, par l’établissement spécialisé qui reçoit le majeur protégé.

    Les comptes bancaires

    Une protection spécifique des comptes bancaires a été mise en place par la loi du 5 mars 2007, modifiée par la loi du 23 mars 2019

    La personne protégée bénéficie d’un droit au compte bancaire. Si elle n’est titulaire d’aucun compte ou livret, le tuteur doit lui en ouvrir un. Les opérations bancaires effectuées au nom et pour le compte de la personne protégée doivent être réalisées au seul moyen des comptes ouverts à son nom. Les produits et plus-values générées par les fonds appartenant au majeur protégé lui reviennent exclusivement (article 427 du code civil)

    Depuis la loi du 23 mars 2019, certaines autorisations judiciaires concernant les comptes bancaires ont été supprimées.

    • L’ouverture et la modification des comptes bancaires au nom de la personne protégée dans sa banque habituelle et les clôtures de comptes ouverts pendant la mesure de protection peuvent se faire librement par le tuteur

    Mais l’autorisation du juge des tutelles reste nécessaire pour :

    • L’ouverture d’un compte ou livret dans un autre établissement bancaire que celui dans lequel la personne protégée détient déjà des comptes ou livrets.
    • La clôture d’un compte ou livret appartenant à la personne protégée ayant été ouvert avant le jugement d’ouverture de la mesure de protection. (voir modèle de requête

    Interdiction bancaire

    Si le majeur protégé fait l’objet d’une interdiction bancaire, le tuteur peut, avec l’autorisation du juge, faire fonctionner sous sa signature les comptes dont il est titulaire et disposer de tous les moyens de paiement habituels.

    3 - Protection de la personne

    A - Les actes personnels

    La loi de 2007 a légiféré sur les conditions dans lesquelles les décisions personnelles de la personne protégée pouvaient être prises. Cette notion de protection de la personne consiste à prendre en compte le plus possible la volonté de la personne protégée dans l’organisation de sa vie personnelle.

    Dans le jugement d’ouverture, soit ultérieurement, le juge des tutelles va fixer les caractéristiques de l’intervention de la personne en charge de la mesure de protection.

    Le juge des tutelles peut aussi, exclure la protection de la personne de l’exercice de la mesure de protection ou à l’inverse ne prévoir qu’une mesure de protection limitée à la personne.

    Cette intervention de la personne en charge de la mesure de protection doit, quand cela est possible, se limiter à donner au majeur protégé une information adaptée à son état, afin que ce dernier puisse prendre seul la décision dans la mesure où son état le permet » (article 457-1 du code civil)

    « La personne protégée reçoit de la personne chargée de sa protection, selon des modalités adaptées à son état et sans préjudice des informations que les tiers sont tenus de lui dispenser en vertu de la loi, toutes informations sur sa situation personnelle, les actes concernés, leur utilité, leur degré d'urgence, leurs effets et les conséquences d'un refus de sa part »

    Ainsi le majeur sous tutelle prend seul les décisions relatives à sa personne dans la mesure où son état le permet, concernant le choix du lieu de résidence, du lieu de vacances, les loisirs, l’organisation de ses fréquentations, la pratique d’une religion,….

    Si l’état de la personne protégé ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le juge peut donner mission à la personne en charge de la protection de l’assister dans la prise de décision (article 459 du code civil).

    Le juge peut prévoir cette assistance pour tous les actes personnels ou seulement pour certains. Comme en matière patrimoniale, l’assistance s’exerce par un double consentement à l’acte

    La loi a prévu, également, une disposition qui résulte de l’ article 459, al 4 du code civil, qui prévoit que la personne en charge de la mesure de protection peut prendre à l’égard du majeur protégé des mesures de protection nécessaires pour mettre fin au danger que, du fait de son comportement, l’intéressé ferait courir à lui-même.

    Cette notion de danger couvre essentiellement une notion de danger physique. Dans ce cas le tuteur doit en informer sans délai le juge des tutelles.

    B- Actes personnels renforcés : mariage, divorce et PACS

    Le législateur, avec la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 a également apporté des modifications du droit des majeurs protégés en supprimant un certain nombre d’autorisations judiciaires afin de renforcer « l’autonomie de la volonté des majeurs protégés pour les actes personnels que sont le mariage, le partenariat civil de solidarité et le divorce ». A l’autorisation préalable du juge sera substitué un droit d’opposition élargi de la personne chargée de la mesure de protection si elle estime que l’acte est contraire aux intérêts du majeur. (Annexe 8 de la circulaire d’application de la loi du 25 mars 2019).

    De tels actes ne sont pas, en effet, seulement des actes personnels, ils ont aussi une dimension patrimoniale. Appelés actes mixtes, ces actes ont une double nature, patrimoniale et extra patrimoniale. Ce sont des actes qui peuvent avoir des conséquences pécuniaires pour le majeur protégé.

    Mariage

    Depuis la loi du 23 mars 2019, le majeur sous tutelle n’a plus à obtenir l’accord du tuteur pour se marier. Il devra simplement informer préalablement le tuteur du projet de mariage (article 460 du code civil). Les futurs époux devront justifier de cette information auprès de l’officier d’état civil sans quoi la célébration du mariage ne pourra pas avoir lieu. (article 63 du code civil). Tout mode de preuve est admis mais par écrit (Note Chancellerie C1/DP/812-2017/2.1.2/CD/MLV, 29 mars 2019).

    Le tuteur peut exercer un droit d’opposition au mariage, s’il considère que ce dernier est contraire aux intérêts de la personne protégée (article 175 du code civil), dans les conditions prévues à l’article 173 du code civil). Il ne peut invoquer que les causes de nullité du mariage prévues, notamment le défaut de consentement de l’article 146 du code civil.

    En présence d’un patrimoine important, il peut être prudent de faire précéder l’union d’un contrat de mariage destiné à protéger les intérêts du majeur protégé. La loi prévoit (article 1399, al 1er du code civil) que le majeur doit être assisté, s’il entend passer une convention matrimoniale.

    Par dérogation à la règle d’assistance, le tuteur peut saisir le juge des tutelles pour être autorisé à conclure seul une convention matrimoniale (alinéa 3 de l’article 1399 du code civil) en vue de protéger les intérêts de la personne protégée.

    Il est à craindre que le futur époux du majeur protégé refuse de signer cette convention matrimoniale qu’il pourra considérer comme une intrusion dans son patrimoine. Cette autorisation du juge ne permettra de passer outre le veto du conjoint et ne pourra donc pas empêcher les époux de se marier.

    La personne en charge de la protection, tuteur ou curateur, ne peut former opposition au mariage pour la sauvegarde des intérêts patrimoniaux du majeur protégé  si ce dernier ne souhaite pas établir un contrat de mariage. Le tribunal de grande instance de Caen a condamné un curateur à verser à un couple une somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens (TGI Caen, 2ème chambre civ., 19 sept. 2019, n° 19/02537)

    La personne en charge de la protection n’est pas non plus à l’abri d’une condamnation à des dommages-intérêts en cas d’opposition abusive (article 179 du code civil), ne bénéficiant pas de l’immunité dont jouissent les ascendants.

    Pacs

    Aucune assistance ni représentation n’est requise lors de la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil ou devant le notaire pour le tutélaire (article 462, al.1 du code civil)

    Pour la conclusion d’un Pacs, la personne sous tutelle doit être assistée lors de la signature de la convention par laquelle elle conclut le pacte.

    Concernant la dissolution du Pacs, le majeur peut le rompre librement par déclaration conjointe ou par décision unilatérale, la représentation n’étant requise que pour la signification et les opérations de liquidation (article 462, al.3 et 6 du code civil). Lorsque l’initiative de la rupture émane de l’autre partenaire, cette signification est faite au tuteur.

    La rupture unilatérale du PACS peut intervenir sur l’initiative du tuteur, après autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué, après audition de l’intéressé et recueil , le cas échéant, de l’avis des parents et de l’entourage.

    Divorce

    Pendant une demande d’ouverture d’une mesure de protection

    L’article 249-3 du code civil interdit d’examiner la demande en divorce à toutes les hypothèses dans lesquelles un époux fait l’objet d’une procédure de mise sous protection juridique. La demande en divorce ne peut être examinée qu’après la mise en place de la mesure. En attendant, le juge aux affaires familiales peut prendre, en cas de besoin, des mesures provisoires prévues aux articles 254 et 255 du code civil

    Après l’ouverture d’une mesure de protection

    Une fois la mesure de protection ordonnée, la procédure de divorce peut avoir lieu.

    La nouveauté de la loi du 23 mars 2019 consiste en la possibilité pour le majeur protégé de pouvoir divorcer pour acceptation du principe de la rupture du mariage. L’article 249 du code civil précise que « la personne protégée peut accepter seule le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci ».

    Si le majeur peut accepter seul le principe du divorce, dans la procédure en divorce, le majeur en tutelle est représenté par son tuteur(en demande comme en défense). C’est entre le tuteur et le majeur protégé que la question du divorce devra être traitée ainsi que ses conséquences tant personnelles que patrimoniales.

    Pour les majeurs protégés, le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage s’ajoute aux autres possibilités suivantes : le divorce pour altération définitive du lien conjugal (délai de un an) et le divorce pour faute. Reste interdit le divorce par consentement mutuel qu’il soit judiciaire (article 249-4 du code civil) ou par acte sous signature privée contresigné par avocats (article 229-2 du code civil) car il ne permet pas un contrôle judiciaire sur la liquidation des droits patrimoniaux. Dans le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage, il appartient au juge de statuer sur les conséquences du divorce.

    En cas d’opposition d’intérêt, si, par exemple, la mesure de protection a été confiée au conjoint, un tuteur ad hoc est nommé (article 249-2 du code civil)

    Pour en savoir plus :

    C - Les actes strictement personnels

    Le majeur peut également accomplir, seul, certains actes dits « strictement personnels » que la loi énumère à l’article 458 du code civil . Cette liste est non limitative : déclaration de naissance d’un enfant, reconnaissance d’un enfant, actes de l’autorité parentale relatifs à un enfant, la déclaration du choix ou du changement du nom d’un enfant et le consentement donné à sa propre adoption ou celle d’un enfant.

    Ce sont des actes pour lesquels personne ne peut consentir hors la personne concernée elle-même. Ces actes sortent du champ de compétence du juge des tutelles ou de la personne chargée de la mesure de protection. Il en résulte que si le majeur protégé n’est pas en mesure de prendre la décision, l’acte ne pourra pas se faire.

    Le droit de vote

    Dans l’objectif de promouvoir les droits et libertés des majeurs protégés, la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice a modifié le code électoral et réformé le droit de vote du majeur placé sous le régime de la tutelle. Elle a abrogé l’article L5 du code électoral qui soumettait le droit de vote des personnes en tutelle à une décision du juge. Il peut désormais exercer son droit de vote dans les mêmes conditions que les autres majeurs protégés.

    D - Les actes spécialement protégés

    Ces actes concernent le choix du logement et les relations personnelles qu’entretient le majeur protégé avec les tiers, le droit d’être hébergé par eux et d’être visité par eux. La personne en charge de la protection n’a pas de pouvoir décisionnel en la matière et ne peut rien imposer.

    Si une difficulté apparaît, le juge des tutelles devra être saisi, saisine simple par courrier, en expliquant la difficulté. Le juge, rendra une décision qui peut faire l’objet d’un recours. (article 459-2 du code civil).

    E - Les actes médicaux

    Si le code civil a édicté les principes généraux sur la protection de la personne, les textes particuliers concernant les actes médicaux figurent pour l’essentiel dans le code de la santé publique. Une ordonnance du 11 mars 2020 a modifie ces dispositions du code de la santé publique et du code de l'action sociale et des familles qui traitent des décisions prises à l'égard des majeurs protégés. Elle met à jour ces dispositions avec le régime de protection instauré par la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs.

    Les actes médicaux sont soumis, au titre des dispositions générales, au régime de l’obligation d’information et au recueil du consentement qui figurent aux articles L.1111-2, al. 1er et L.1111-4 du code de la santé publique.

    Le premier de ces textes énonce que toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. L’information porte sur l’action proposée, son utilité, son urgence éventuelle, ses conséquences .
    L’information doit être appropriée et le consentement doit être libre et éclairé.

    L’information doit être délivrée au cours d’un entretien individuel avec l’intéressé, conformément à l’article L.1111-2 du code de la santé publique. La personne peut être accompagnée d’un tiers qui peut-être la personne de confiance.

    De son côté, l’article 459 du code civil pose comme règle fondamentale que le majeur protégé prend seul les décisions qui relèvent de la sphère personnelle dans la mesure où son état le permet. Le majeur consent donc seul aux soins s’il est en état de le faire que l’acte soit bénin ou grave.

    Si l’état de santé de la personne sous tutelle ne lui permet pas de prendre une décision éclairée et que dans le jugement, le tuteur a reçu une mission d’assistance ou de représentation concernant la personne, son rôle sera différent d’où l’importance de bien lire le jugement. Si l’intitulé de la mission n’est pas précis, flou, le tuteur devra demander au juge de préciser son autorisation (article 461 du code de procédure civile), autorisation prévue à l’article 459 al. 2 du code civil.

    Rôle du tuteur avec mission d’assistance de la personne protégée

    Lorsque l'état de la personne protégée ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué peut prévoir qu'elle bénéficiera, pour l'ensemble des actes relatifs à sa personne ou ceux d'entre eux qu'il énumère, de l'assistance de la personne chargée de sa protection (article 459, al.2 du code civil) hors les cas prévus à l’article 458 du code civil

    Dans ce cas de figure, l’information peut être délivrée à la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec assistance à la personne si le majeur protégé y consent expressément.

    Rôle du tuteur avec mission de représentation de la personne protégée

    Au cas où cette assistance ne suffirait pas, le juge des tutelles peut autoriser le tuteur à représenter l'intéressé, y compris pour les actes ayant pour effet de porter gravement atteinte à son intégrité corporelle.

    Le majeur restera le premier destinataire de l’information mais le tuteur doit également la recevoir.

    Deux situations peuvent se présenter

    1) Le majeur en tutelle est apte à délivrer un consentement lucide, il consent seul, sans assistance ni représentation. S’il a besoin d’un soutien pour consentit à l’acte, le protecteur peut l’assister. Le tuteur, dans ce rôle d’assistance, cosignera l’acte écrit autorisant l’acte médical.

    Sauf urgence, en cas de désaccord entre le majeur protégé et la personne chargée de sa protection, le juge autorise l'un ou l'autre à prendre la décision (CSP, art. L.1111-4, al. 8) sans décider de l’opportunité ou non de l’intervention.

    2) Le majeur en tutelle n’est pas apte à délivrer un consentement lucide, le protecteur a le pouvoir d’autoriser l’acte médical. Il le fera en tenant compte de l’avis du majeur protégé d’une part et sur proposition du médecin traitant. Mais il peut aussi refuser sur la foi de contre-indications médicales ou du refus de l’intéressé.

    Si le refus opposé par le tuteur est considéré par le médecin comme risquant d’entraîner des conséquences graves pour la santé du majeur protégé, le médecin peut se passer ce cette autorisation pour délivrer les soins indispensables, ce que permet l’article L.1111-4, al. 9 du CSP).

    En cas d’urgence vitale, un médecin appelé à donner des soins à un majeur protégé doit s'efforcer de prévenir son représentant légal. Si celui-ci ne peut être joint, le médecin doit donner les soins nécessaires. Si l'avis de l'intéressé peut être recueilli, le médecin doit en tenir compte dans toute la mesure du possible (R.4127-42 du code de la santé publique)

    Rôle du tuteur sans mission d’assistance ou de représentation de la personne protégée

    Si le tuteur n’a pas reçu du juge de mission d’assistance ou de représentation de la personne au sens de l’article 459, alinéa 2 du code civil, il n’a aucun rôle décisionnel à jouer en matière de santé. Il n’a pas à être informé par le médecin.

    Son rôle se limite à une information du majeur protégé alors même qu’il n’est pas associé au processus d’information ni de décision médicale.

    Sans pouvoir de représentation de la personne et si l’état de santé de la personne le justifie alors qu’elle n’est pas apte à exprimer sa volonté, le tuteur devra saisir le juge des tutelles d’une demande de renforcement de la mesure de protection.

    Personne de confiance et directives anticipées

    Lorsqu'une personne fait l'objet d'une mesure de tutelle, elle peut désigner une personne de confiance avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué. Dans l'hypothèse où la personne de confiance a été désignée antérieurement à la mesure de tutelle, le conseil de famille, le cas échéant, ou le juge peut confirmer la désignation de cette personne ou la révoquer.

    Rien n’interdit que letuteur, sans avoir reçu d’autorisation de représentation pour les décisions personnelles , soit désigné par le majeur en qualité de personne de confiance. Cette désignation lui permet de recevoir l’information médicale. Cela ne lui donne aucun pouvoir d’assistance ou de représentation au sens du Code civil. Il donne un avis sur le consentement qu’aurait donné le majeur protégé s’il avait été conscient et lucide. Son témoignage prévaut sur tous les autres membres de la famille.

    La personne majeure sous tutelle peut également rédiger des directives anticipées avec l'autorisation du juge. Ces directives anticipées ne peuvent être utilisées que dans le cadre de la fin de vie.

    4- Mise en place d’une tutelle

    A - Ouverture d’une mesure de tutelle

    Comme pour toute demande d’ouverture d’une mesure de protection, la requête doit obligatoirement être accompagnée d’un certificat médical circonstancié (art. 431 du code civil). Son contenu est précisé à l’article 1219 du code de procédure civile. Son coût est fixé à 160 € par décret auquel peut s’ajouter des frais de déplacement. La demande d’ouverture peut être adressée au juge par les personnes mentionnées à l’article 430 du code civil en précisant l’identité de la personne à protéger et les faits qui la motivent et dont le contenu est fixé à l’article 1218-1 du code civil.

    Un formulaire de la requête est disponible : cerfa n° 15891, intitulé «  Requête en vue d'une protection juridique d'un majeur (habilitation familiale ou protection judiciaire) » accompagné d’une notice explicative.

    La procédure est là aussi identique aux autres mesures : instruction du dossier de demande par le juge des tutelles, auditions des parties concernées, décision.

    Voir article : Mise en place d’une mesure de protection

    B – Désignation du tuteur

    Sous tutelle, le majeur est représenté par un tuteur désigné par le juge qui l’aide à accomplir les actes mettant en jeu son patrimoine. Le juge doit respecter une hiérarchie entre les personnes susceptibles d’être nommées comme indiqué aux articles 448 et 449 du code civil.

    Cela va de la personne désignée par le majeur à protéger, au cercle familial et d’amis. Si aucun membre de la famille, ni aucun proche ou allié ne peut ou ne souhaite prendre la charge de tuteur, le juge va désigner un mandataire professionnel.

    Le juge peut désigner une pluralité de tuteurs, en considération de la situation du protégé, de la consistance du patrimoine à gérer et des aptitudes des tuteurs.

    Il peut désigner également un tuteur chargé de la personne et un autre chargé du patrimoine et/ou un « subrogé tuteur» qui va contrôler les actes du tuteur et alerter le juge en cas d’irrégularité (article 454 du code civil).

    En l’absence de subrogé tuteur, le juge pourra nommer également un « tuteur ad hoc » lorsque les intérêts du tuteur se trouvent en opposition avec ceux de la personne protégée (en matière de divorce lorsque l’époux est tuteur, par exemple).

    La rémunération du tuteur

    Tuteur familial

    Un proche qui devient tuteur exerce sa mission gratuitement. Le juge peut autoriser le versement d’une indemnité au tuteur bénévole, dont il fixe le montant, si l’importance des biens à gérer ou sa difficulté le justifient (article 419 du code civil)

    Tuteur professionnel

    Une tutelle exercée par un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJMP), un professionnel, fait l’objet d’une rémunération, fixée par les pouvoirs publics, à la charge de la personne protégée, en fonction de ses ressources (article R.471-5-3 du code de l’action sociale et des familles). La collectivité publique prend en charge le financement, si la personne protégée ne peut, intégralement ou partiellement la financer.

    Le juge des tutelles, peut également, allouer au tuteur, une rémunération complémentaire, fixée par les pouvoirs publics, pour l’accomplissement de démarches particulièrement longues ou complexes sortant de la gestion normale de la mesure de protection (article D. 471-6 du code de l’action sociale et des familles.

    C - Fin de la tutelle

    La tutelle peut cesser dans quatre cas (article 443 du code civil):

    • Avec un jugement de mainlevée. La décision peut intervenir au moment de la révision de la mesure mais également à tout moment
    • La tutelle arrive à son terme. Sans demande de renouvellement de la mesure ou si aucune autre mesure n’est prononcée, l’arrivée du terme de la tutelle est une cause d’extinction. Le majeur protégé retrouve sa pleine capacité juridique.
    • En cas d’éloignement géographique (article 443, al 2 du code civil). Si la personne réside hors du territoire national et que cet éloignement empêche le suivi et le contrôle de la tutelle
    • Le décès du majeur protégé. Au décès du majeur protégé, si le tuteur organise les obsèques et clôture les comptes bancaires à la place des héritiers, l’ex-tuteur est considéré comme faisant de la gestion d’affaires.

     

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