Bonjour !
Vous posez-là une excellente question qui correspond à l’idée que beaucoup se font d’une mesure de protection. Nous comprenons très bien que cette situation soit difficilement supportable par le voisinage, situation que l'on rencontre très souvent, même avec des personnes qui ne sont pas sous mesure de protection.
Je commencerai par vous répondre que la curatelle, comme la tutelle, est une mesure de protection de la personne qui en bénéficie et non de son environnement. Ainsi, le mandataire judiciaire désigné n’a aucun droit coercitif sur la personne, au contraire il est là pour l’aider à préserver ses droits.
La protection s’articule autour du respect de la volonté de la personne, de ses choix de vie, de ses habitudes, et une forte protection de son logement. Un début de solution vous concernant se trouve dans ce dernier aspect. Je m’explique.
Étant chargé de la protection de son logement, le curateur/tuteur a le devoir de l’informer des répercutions et des conséquences que ses actes pourraient entrainer vis-à-vis du bail. La plupart du temps, le règlement de copropriété prévoit un usage tranquille des lieux, un entretien régulier de l’appartement, le respect des voisins, des parties communes, etc. Si ce règlement n’est pas respecté, le propriétaire, saisi de demandes écrites par les voisins ou le syndic, peut être amené à sommer le locataire de modifier son comportement sous peine de résilier le bail. C’est ici que le mandataire judiciaire aura pour rôle d’inciter le locataire sous curatelle ou sous tutelle à modérer son comportement afin d’éviter une telle issue (si tant est qu’il soit possible de raisonner une personne qui est manifestement atteinte de troubles psychologiques). Mais il ne peut, ni ne doit, comme vous le demandez, changer le comportement de la personne.
En tutelle, si les moyens de la personne le permettent, le tuteur pourra également imposer un nettoyage de l’appartement de temps en temps, voire régulier si nécessaire. En curatelle, il ne pourra que le conseiller.
Concernant les soins dont la personne aurait besoin, le tuteur/curateur doit s’assurer que la personne protégée a accès aux soins, mais en aucun cas il ne peut l’obliger à se soigner. Le curateur peut également informer le médecin ou tout autre intervenant auprès de cette personne d’une dégradation de la situation afin que chacun puisse, le cas échéant, adapter son intervention : seuls les médecins peuvent décider d’une hospitalisation ou de l’administration d’un traitement et d’un suivi infirmier.
Sauf à parler d'une hospitalisation sous contrainte, qui ne peut être demandée que si et seulement si la personne représente un danger réel et immédiat pour lui ou son entourage. Cette hospitalisation nécessite l'établissement, au moment des faits, de deux certificats médicaux établis par deux médecins hors structure hospitalière devant l'accueillir.
En matière de responsabilité relative aux exactions du majeur protégé, celle du tuteur/curateur ne peut être engagée, la personne restant seule responsable de ses actes. Le curateur a donc une obligation de moyens, mais en aucun cas de résultats. Le seul danger auquel le tuteur est tenu de mettre fin est celui qui menace le majeur protégé lui-même… lorsque par exemple, des personnes vivent sous le même toit que lui, chez lui et sans son consentement, le privant ainsi de ses droits élémentaires.
Dans votre situation, chacun doit prendre ses responsabilités dans le rôle qui est le sien : les témoins signalent au syndic les faits, faits qui seront répercutés par le syndic au propriétaire qui devra écrire au locataire + au curateur ou au tuteur en LRAR afin de l’enjoindre de mettre fin à ses comportements, sous peine de voir le bail résilié. En cas de récidive, et selon les termes du bail et du règlement de copropriété, le propriétaire sera fondé à résilier le bail par LRAR. Ensuite, le curateur aidera le locataire à comprendre ce qui se passe et à rechercher une solution. Il n’est pas exclu, si le locataire sous curatelle refuse de quitter les lieux, que le propriétaire doive engager une procédure en expulsion.
La plupart du temps, si le locataire est en mesure d’adapter son comportement, les choses reviendront au calme.
Anne-Laure ARNAUD
Mandataire Judiciaire à la Protection des Majeurs
Secrétaire adjointe de la Fédération Nationale des MJPM Indépendants (FNMJI)
www.fnmji.fr