Bonjour Guijo,
La situation de votre fille représente le comble du dysfonctionnement pour une mesure de protection : entraver le retour à l'autonomie d'un majeur protégé !
Une des causes principales est que la reprise en main de la gestion de ses intérêts par le majeur protégé est malheureusement un cas peu fréquent, les mesures tendant plutôt à s'aggraver. La situation étant inhabituelle, les divers acteurs ne savent pas trop quoi faire et chacun est tenté de botter en touche... C'est d'autant plus regrettable que l'allègement d'une mesure est l'issue positive que souhaite tout MJPM qui se respecte !
Concrètement, que faire ?
Bien évidemment nous ne pouvons vous apporter de solution miracle, mais voici quelques pistes et points d'attention qui vous seront peut-être utiles.
1°)
Un premier point d'attention concerne la façon dont votre fille va vivre cette situation. D'après ce que vous avez expliqué, elle n'est pas habituée à gérer ses affaires en situation "normale". Hors il n'est pas certain que faire face à une situation inextricable et potentiellement conflictuelle soit un bon contexte pour s'initier à cela. Pour certaines personnes il arrive que cela provoque un déclic combatif qui peut être très positif et conduire à une surmotivation de la personne pour prendre les choses en main. Mais cela peut aussi conduire à l'effet inverse en créant un profond sentiment de répulsion à l'égard de toutes les tâches de gestion (ce que beaucoup de personnes pas du tout vulnérables comprendront aisément étant elles-même allergiques à la paperasse...). C'est pourquoi il sera important que vous ajustiez la manière dont vous l'aidez en fonction de ses réactions. Certes il faut la responsabiliser sur le sujet, mais n'hésitez pas à prendre en charge certaines étapes trop conflictuelles pour éviter qu'elle ne soit trop brutalement exposée. Notez bien qu'il ne s'agit pas de trouver une configuration idéale (qui n'existe pas) mais seulement d'éviter les situations extrêmes.
2°)
Pour obtenir la collaboration de la curatrice, il faudrait comprendre qu'elle est sa contrainte principale pour ne pas aider votre fille à reprendre ses affaires en main. Il est vrai que les contraintes qui pèsent sur ce métier sont nombreuses et difficiles à concilier et rares sont les MJPM qui n'essaient pas de faire sincèrement de leur mieux. Mais ils manquent souvent de temps, ou ne connaissent pas la procédure à suivre, ou encore l'organisation est défaillante (phénomène particulièrement sensible dans les associations). Notez bien que nous ne cautionnons aucunement les défaillances de ces MJPM, et que nous cherchons au contraire à contribuer avec nos humbles moyens à l'amélioration de la situation. Si nous vous expliquons cette situation c'est pour vous aider à trouver le bon argument pour obtenir la collaboration de la curatrice. Évidemment pour la comprendre il faut quand même pouvoir lui parler...
Mais bien souvent une bonne approche consiste à lui proposer une sortie en quelques étapes simples et limitant au maximum sa charge de travail.
Par exemple :
- un premier RV avec vous pour préparer efficacement la reprise de la gestion courante. Demandez-lui simplement d'avoir une copie du dossier et rassurez-la sur le fait que vous allez aider votre fille à organiser cela afin que la curatrice n'ait pas de complication à gérer.
- puis un second RV avec votre fille pour procéder officiellement au transfert et convenir des modalités de suivi de la curatelle simple.
Notez au passage que l'ordre de ces RV n'est pas tout à fait conforme à la loi. En toute rigueur, la curatrice ne devrait pas parler avec vous des affaires de votre fille sans recueillir son consentement préalable... Mais en lui proposant cet ordre vous la rassurez et lui proposez une solution de sortie "facile" qui maximise vos chances de débloquer la situation. Après tout, puisque dysfonctionnements il y a, autant que certains soient utiles pour votre fille...
3°)
Concernant la banque et, plus globalement, toute personne physique ou morale tierce :
- la décision de justice lui est opposable dès que vous pouvez prouver qu'elle en a eu connaissance ou, à défaut, "deux mois après que la mention en a été portée en marge de l’acte de naissance de la personne protégée" - CC Art.444 (cf
dossier Curatelle : publicité de la mesure
). Cela pouvant prendre jusqu'à six mois, il est nécessaire d'envoyer par LR-AR la copie du jugement d'allègement de la mesure. Dès lors vous pourrez obliger la banque à en tenir compte.
- sous curatelle simple, la gestion des comptes revient à votre fille et la banque doit s'exécuter (voir notre dossier "
Notifier la mesure aux banques
" ). L'intervention de la curatrice ne reste nécessaire que pour les actes de disposition tels que l'ouverture d'un crédit ou un retrait sur un livret d'épargne. Produisez les textes de loi au préposé de la banque et si votre interlocuteur ne comprend rien à ce que vous dites, n'hésitez pas à escalader rapidement en hiérarchie : cela fera gagner du temps à tout le monde...
Nous espérons que ces quelques explications pourront vous aider à accompagner efficacement votre fille dans une zone de moindre turbulence où elle pourra, espérons-le, retrouver son autonomie dans de meilleures conditions.
Nous vous souhaitons bonne chance et bon courage.
pour Tutelle Au Quotidien,
l'équipe Entraide et Assistance